Dans la peau de Scopetto : souvenirs de 'La Sirène' à Compiègne
Il y a des rôles qui vous marquent par leur panache et leur énergie communicative. Celui de Scopetto, le fourbe et sympathique contrebandier de 'La Sirène' d’Auber, est sans aucun doute de ceux-là. Remonter sur les planches du magnifique Théâtre Impérial de Compiègne pour redonner vie à cet opéra-comique oublié fut une aventure artistique que je chéris particulièrement.
La musique d’Auber est un pur délice. Elle possède cette élégance typiquement française, une légèreté qui n'est jamais synonyme de facilité. Au contraire, sa partition est inventive, rythmée, et demande une précision constante. En tant qu'interprète, c'est un défi stimulant : il faut allier la rigueur vocale à une exubérance scénique pour rendre justice à l'esprit de l'œuvre.
Un rôle créé par une légende
Ce qui rendait l'aventure encore plus spéciale, c'était de marcher dans les pas d'une véritable légende. Le rôle de Scopetto fut créé en 1844 par le ténor Gustave-Hippolyte Roger, et ce n'est pas un héritage anodin, comme le souligne avec justesse le critique Jean-Michel Pennetier.
"Le rôle de Scopetto avait été écrit pour le ténor Gustave-Hippolyte Roger, créateur entre autres de Faust dans La Damnation de Faust et de Jean de Leyde dans Le Prophète de Meyerbeer. Excusez du peu. Xavier Flabat y est excellent, bon acteur-chanteur, avec un timbre d’une belle fraîcheur."
Savoir qu'un tel monstre sacré avait donné sa voix à ce personnage pour la première fois ajoute une pression délicieuse et une immense source d'inspiration. On se sent dépositaire d'un héritage, avec la mission de le faire briller à nouveau.
L'énergie du plateau
La critique de Charlotte Saulneron pour Olyrix disait "(...) Xavier Flabat dans le rôle du fourbe Marco Tampesta qui se cache sous l'identité de Scopetto, a une assurance bien plus palpable, autant dans un chant dont la projection et la diction se révèlent solides, autant dans son jeu scénique empreint d'une belle fougue et d'un dynamisme exemplaire." C'est exactement ce que je ressentais sur scène. Scopetto est un personnage qui ne s'économise pas. Il est le moteur de nombreuses intrigues, et il fallait lui insuffler une vitalité constante, tant dans le chant que dans le jeu.
Les Frivolités Parisiennes, sous la baguette impeccable de David Reiland, et le chœur Les Métaboles ont créé un écrin musical idéal. Cette production, même si elle était encore en rodage lors de la première, avait le mérite de l'audace et de la passion. C'est ce qui fait la magie de notre métier : redonner vie à des trésors oubliés et les partager avec le public. Donner vie à Scopetto, avec sa verve et son panache, fut un véritable plaisir et une fierté.